Grèce : LE FMI SE FAIT TRÈS INSISTANT, par François Leclerc

Billet invité.

En titrant leur billet « le FMI ne demande pas plus d’austérité à la Grèce », deux de ses responsables (1) avaient en décembre dernier fait une mise au point qui à leurs yeux s’imposait. Sur le même sujet, un rapport confidentiel destiné à être présenté à ses États membres début février a hier fuité. Selon celui-ci, la dette grecque est « intenable » et « explosive », et les pays de la zone euro sont appelés à l’alléger. Des pistes sont suggérées : extension de la maturité des prêts jusqu’en 2070 et prolongement de la période de grâce sur les remboursements jusqu’en 2040. Ce qui éviterait une réduction du principal de la dette ou plus probablement la repousserait. Faute que ses propositions soient adoptées, la dette atteindra 275% du PIB conclut sans appel le rapport…

Ne pouvant accorder de prêts à des pays dont la dette est insoutenable, le FMI ne devrait pas participer financièrement au 3ème plan de sauvetage de la Grèce si ses propositions ne sont pas acceptées, prenant à contre-pied les dirigeants allemands. Décidément, 2017 ne sera pas l’occasion d’une trêve électorale. La crise grecque rebondit, le FMI continuant de prendre ses distances avec la politique des Européens. Les sommets ne vont pas manquer dans les semaines à venir pour en débattre dans les couloirs, à Malte puis à Rome, dont celui qui se tient aujourd’hui à Lisbonne en configuration réduite, qui regroupe les sept pays du sud de l’Union européenne (2). Deux questions dominent les discussions : comment parvenir à desserrer le carcan budgétaire et comment se préparer à un nouvel afflux de réfugiés au printemps ? Les deux n’ont pas de réponse.

Ce n’est pas une nouveauté, l’Espagnol Mariano Rajoy souhaite que les normes soient « respectées intelligemment », comme il l’a répété, tandis que Paolo Gentiloni, le chef du gouvernement italien, demande de la « souplesse » et que la croissance soit « au centre » des politiques. Mais que peuvent espérer les « Sept », s’ils ne formulent pas de politique alternative à celle de Wolfgang Schäuble ? Celui-ci avance ses pions pour renforcer la sienne en proposant de substituer le Mécanisme européen de stabilité (MES) au FMI, tandis qu’ils s’en tiennent à demander des ajustements qu’il n’a pas l’intention d’accorder.

La corde est en train de se tendre à nouveau, et on ne voit pas ce qui pourrait la détendre. Ce ne sera en tout cas pas François Hollande, qui a escamoté les discussions de Lisbonne en changeant de terrain pour proposer de « répondre avec fermeté » à Donald Trump. Tout à sa fable, il a prétendu que « l’Europe a fait son devoir » à propos des réfugiés, n’ayant pas de mal à faire du nouveau président américain un repoussoir afin de « convaincre les Européens d’aller plus loin ensemble » face au « populisme » qu’il incarne, l’Europe devenant « une protection » à ce qu’il représente. Pour autant cela ne règle pas les problèmes de cette dernière, sur lesquels il ne s’est pas publiquement prononcé, tout à son rôle planétaire.

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(1) Maurice Obstfeld, économiste en chef, et Poul Thomsen, chef de mission en Grèce.

(2) France, Italie, Espagne, Portugal, Grèce, Chypre et Malte.